Mélenchon et « la question juive » – Charlie Hebdo

Published by Observatoire Juif de France on

À la question posée par Bruce Toussaint de savoir si Éric Zemmour est, ou pas, antisémite, Jean-Luc Mélenchon s’est lancé dans une explication oiseuse, alambiquée et totalement fausse au regard de l’histoire du judaïsme.

« Monsieur Zemmour ne doit pas être antisémite parce qu’il reproduit beaucoup de scénarios culturels : on ne change rien à la tradition, on ne bouge pas, la créolisation, mon dieu, quelle horreur ! Et tout ça, ce sont des traditions qui sont beaucoup liées au judaïsme. Ça a ses mérites d’ailleurs, ça lui a permis de survivre dans l’histoire. Donc moi je ne crois pas qu’il soit antisémite. »

Si vous ne saviez pas qu’il existait des « scénarios culturels du judaïsme », Mélenchon, lui, le sait. Et parmi ces scénarios culturels, on trouverait, explique Mélenchon, le « zemourisme », une manière de voir qui aspire à ne rien changer à la tradition, et refuse la créolisation. Je sais, c’est difficile à suivre, et pénible à lire comme à entendre, puisque ce sont les propos que le leader de la France Insoumise a tenu sur BFM le 28 octobre.

En découvrant ces mots, on songe aux « Scénarios culturels du mélenchonisme », les étranges propos qu’il tient, de loin en loin, sur les juifs. Et toujours parmi ces « scénarios culturels du Mélenchonisme », il se trouvera certainement des exégètes de la parole de Jean-Luc pour nous expliquer que cet homme est un authentique universaliste, ou bien encore qu’il n’a rien d’un antisémite. Mais peu importe ce qu’est, au fond de son âme, Monsieur Mélenchon, par rapport à la question juive. Ce qui est clair, en revanche, c’est que ces propos sont parfaitement essentialistes, et même, explicitement culturalistes. Selon ce discours, il existe une « culture juive » qui prédisposerait les juifs à être conservateurs et mixophobes, autrement dit à refuser de se mélanger.

Monsieur Mélenchon n’a rien inventé ; cette thèse est aussi vieille que l’empire romain – seulement on la pensait enterrée avec Jules César ou presque. Il y a deux mille ans, déjà, on accusait les juifs d’être arc-boutés sur leurs traditions, et de refuser de s’assimiler. Ce qui est rigolo, c’est qu’il y a un peu plus d’un demi-siècle, un historien du judaïsme antique, Cecil Roth, s’est amusé à mesurer le nombre de mariages mixtes, et de conversions, au sein de l’empire romain. Et il s’est rendu compte que les juifs s’étaient en masse fondus dans la culture majoritaire, battant en brèche ce vieux stéréotype.

On ne peut pas reprocher à Mélenchon de ne pas avoir lu Roth. On pourrait, en revanche, lui en vouloir de ne pas mesurer les conséquences de ses propos : reprendre dans sa bouche les préjugés les plus éculés formulés à l’encontre des juifs. 

Source: charliehebdo.fr 

 

 


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